SRI AUROBINDO
Lettres sur le Yoga
Volume 1. Section 1
9. Destin et libre arbitre, karma et hérédité, etc.
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Les textes que vous m'envoyez, pris isolément, sont très impressionnants, mais à la lecture du livre, cette impression diminue et s'estompe. Vous avez cité les réussites de Cheiro, mais ses échecs? J'ai parcouru le livre et j'ai été frappé par le nombre de prophéties qui ne se sont pas réalisées. Vous ne pouvez pas déduire d'un petit nombre de prédictions, si exactes soient-elles, que tout est prédéterminé, y compris les questions que vous posez dans votre lettre et ma réponse. C'est possible, mais les faits invoqués ne suffisent pas à le prouver. Ce qui est évident, c'est qu'il existe, dans le cours des événements, un élément de pré visibilité, de prévisibilité exacte et dans le détail autant que dans les grandes lignes. Mais on le savait déjà: la question reste posée de savoir si tout peut être prédit, si la destinée est le seul facteur dans l'existence, ou si d'autres facteurs peuvent aussi modifier la destinée — ou si, la destinée étant admise, il n'y a pas d'autres sources, pouvoirs ou plans de destinée, et si nous ne pouvons pas modifier celle d'où nous sommes partis en faisant appel à une autre source, un autre pouvoir ou plan de destinée et en le rendant actif dans notre vie. Les questions métaphysiques ne sont pas simples au point qu'on puisse les trancher dans un sens ou dans l'autre — c'est la manière courante de résoudre les problèmes, mais elle est tout à fait sommaire et peu concluante. Tout est libre arbitre, ou alors tout est destinée-ce n'est pas si simple. Cette question du libre arbitre ou du déterminisme est la plus épineuse de toutes les questions métaphysiques et personne n'a été capable de la résoudre — pour la bonne raison que la destinée et la volonté existent toutes les deux, et même un libre arbitre existe quelque part; la difficulté est de savoir comment l'atteindre et le rendre opérant.
L'astrologie? Beaucoup de prédictions astrologiques se réalisent, et même un assez grand nombre, si on les considère toutes ensemble. Mais il ne s'ensuit pas que les astres régissent notre destinée; les astres ne font que consigner une destinée qui a déjà été formée, ils sont un hiéroglyphe, non une Force — ou si leur action constitue une force, c'est une énergie qui transmet, non un Pouvoir générateur. Nous pouvons dire que quelqu'un est là qui a déterminé, ou que quelque chose est là qui est le Destin; les astres donnent seulement des indications. Les astrologues eux-mêmes disent qu'il y a deux forces, daiva et puruṣakāra, le destin et l'énergie individuelle, et l'énergie individuelle peut modifier et même contrecarrer le destin. En outre, les astres indiquent souvent plusieurs destinées possibles; par exemple, un individu risque de mourir dans la force de l'âge, mais si ce déterminisme est surmonté, il pourra vivre jusqu'à un âge avancé et prévisible. Enfin, on voit des cas où les prédictions de l'horoscope se réalisent avec une grande exactitude jusqu'à un certain âge, puis ne s'appliquent plus. Cela se produit souvent quand le sujet s'écarte de la vie ordinaire pour se tourner vers la vie spirituelle. Si le tournant est radical, toute possibilité de prédiction cesse immédiatement; autrement, certaines conséquences peuvent se prolonger pendant un certain temps, mais n'ont plus le même caractère inévitable. Cela semblerait démontrer qu'il y a ou qu'il peut y avoir un pouvoir supérieur, ou un plan supérieur, ou une source supérieure de destinée spirituelle qui peut, si son heure est venue, annuler le pouvoir inférieur, le plan inférieur ou la source inférieure de destinée vitale et matérielle indiquée par les astres. Je dis vitale, parce que le caractère peut aussi être indiqué par l'horoscope de façon beaucoup plus complète et beaucoup plus satisfaisante que les événements de la vie.
L'explication indienne du destin est le Karma. Nous sommes nous-mêmes notre propre destin par nos actions, mais la destinée que nous créons nous lie; car ce que nous avons semé, nous devons le récolter, dans cette vie-ci ou dans une autre. Nous continuons à créer notre destin pour l'avenir, tout en subissant dans le présent la destinée ancienne venue du passé. Cela donne un sens à notre volonté et à notre action et ne constitue pas, comme le croient à tort les critiques européens, un fatalisme rigide et stérilisant. Mais de nouveau, notre volonté et notre action peuvent souvent annuler ou modifier même le Karma passé; seuls certains effets très puissants, appelés utkaṭa karma, ne sont pas modifiables. Ici aussi, le fait d'entrer dans la conscience et la vie spirituelles est censé annuler ou donner le pouvoir d'annuler le Karma. Car nous nous unissons à la Volonté divine, cosmique ou transcendante, qui peut annuler ce qu'elle avait approuvé sous certaines conditions, créer à nouveau ce qu'elle avait créé; les lignes étroitement tracées disparaissent, il y a une liberté et une ampleur plus souples. Ni le Karma, ni l'astrologie n'indiquent donc une destinée rigide et à jamais immuable.
Quant aux prophéties, jamais je n'ai rencontré ni entendu parler d'un prophète, quelle que soit sa réputation, qui soit infaillible. Certaines des prédictions de ces prophètes se réalisent à la lettre, d'autres non; elles se réalisent à moitié ou tombent tout à fait à côté. Il ne s'ensuit pas que le pouvoir de prophétie n'existe pas ou que toutes les prédictions exactes puissent s'expliquer par la probabilité, le hasard, la coïncidence. La nature et le nombre de celles qui sont inexplicables est trop grand. La nature variable de leur accomplissement peut s'expliquer soit par un pouvoir imparfait chez le prophète — pouvoir qui tantôt est actif et tantôt lui fait défaut — soit par le fait que les choses peuvent être prédites en partie seulement, ou ne sont qu'en partie déterminées ou alors le sont par différents facteurs ou lignes de force, différentes séries de potentialités et de faits. Tant que l'on est en contact avec l'une de ces lignes, on prédit exactement, autrement non; ou si les lignes de force changent, la prophétie aussi déraille. Néanmoins, on pourrait dire que si la prédiction est le moins du monde possible, il doit y avoir un pouvoir ou un plan au moyen duquel ou sur lequel tout est prévisible; s'il y a une Omniscience et une Omnipotence divines, il doit en être ainsi. Même dans ce cas, ce qui est prévu doit être exécuté, est en fait exécuté par un jeu de forces — forces spirituelles, mentales, vitales et physiques — et dans ce plan de forces on ne peut découvrir aucune rigidité absolue. La volonté ou l'effort personnel est l'une de ces forces. Napoléon, quand on lui demandait pourquoi il croyait au Destin alors qu'il était sans cesse en train de faire des plans et d'agir, répondait: "Parce qu'il est écrit que je dois agir et faire des plans"; en d'autres termes, ses plans et son action faisaient partie du Destin, contribuaient au résultat que le Destin avait en vue. Même si je prévois un résultat contraire, je dois œuvrer pour celui qui, à mon avis, doit être; car cela maintient en vie la force, le principe de Vérité que je sers, et lui donne un possibilité de triompher par la suite, pour qu'il s'intègre au processus du Destin futur favorable, même si la destinée du moment est contraire. Les hommes n'abandonnent pas une cause parce qu'ils l'ont vue échouer ou prévoient son échec; spirituellement, ils ont raison dans leur persévérance obstinée. De plus, nous ne vivons pas pour le résultat extérieur seulement; l'objectif de la vie est bien plus la croissance de l'âme — non le succès extérieur du moment ou même du proche avenir. L'âme peut croître en dépit ou même au moyen d'une destinée matérielle contraire.
Enfin, même si tout est déterminé, pourquoi dire que la vie est, selon l'expression de Shakespeare ou plutôt de Macbeth, "un conte raconté par un idiot, plein de bruit et de fureur, ne signifiant rien"? il en serait ainsi, en effet, si tout dans la vie était incertitude hasardeuse et fortuite. Mais si c'est quelque chose de prévu, d'arrêté dans le moindre détail, est-ce que cela n'implique pas plutôt que la vie signifie quelque chose, qu'il doit y avoir un Dessein secret vers lequel tout s'élève par degrés, puissamment, avec persistance, à travers les âges, et dont nous faisons nous-mêmes partie, où nous sommes des compagnons de travail dans l'accomplissement de cet invincible Dessein?
P. S. Je dois dire que l'une des plus grandes extases possibles est de se sentir porté par le Divin, non par les astres ou le Karma — car celui-ci est une triste affaire, aride et inconfortable, comme si on vous faisait tourner dans une machine, "yantrārūḍhāni māyayā''.
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Je crains bien que les idées de Cheiro et ses prophéties ne m'inspirent guère confiance — certaines prophéties se réalisent, mais la plupart se sont révélées fausses. L'idée concernant les Juifs est une vieille croyance juive et chrétienne; on ne peut guère y ajouter foi. Quant aux nombres, il est vrai que, selon, la science occulte, ils ont une signification mystique. Il est vrai aussi qu'il y a des périodes et des cycles dans la vie comme dans la vie du monde. Mais on ne peut pas toujours attacher à ces choses une signification trop précise.
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Je n'ai pas dit que tout était rigidement prédéterminé. Ce n'est pas ce que signifie jeu de forces. J'ai dit que derrière les événements visibles dans le monde, il y a toujours une masse de forces invisibles qui travaillent à l'insu du mental extérieur de l'homme, et par le yoga (en allant au-dedans et en établissant un lien conscient avec le Moi et la Force cosmiques et avec les forces cosmiques), on peut devenir conscient de ces forces, intervenir consciemment dans le jeu et, jusqu'à un certain point au moins, déterminer les choses dans le résultat du jeu. Tout cela n'a rien à voir avec la prédétermination. Au contraire, on regarde comment les choses évoluent et on donne une impulsion ici et là quand c'est possible ou quand c'est nécessaire. Rien de tout cela ne contredit le mot du grand savant sir C. V. Raman. Raman a dit un jour que toutes ces découvertes scientifiques ne sont que des jeux de hasard. Or quand il dit que les découvertes scientifiques sont des jeux de hasard, il ne fait que constater que les êtres humains ne savent pas comment cela aboutira. Ce n'est pas une prédétermination rigide, mais ce n'est pas non plus un Hasard aveugle et inconscient. C'est un jeu dans lequel il y a une exécution des possibilités dans le Temps.
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Il est vraiment difficile de démêler ce que Planck veut dire dans ces pages, quelle est sa conclusion et comment il y parvient; il a sans doute tellement condensé ses arguments que les maillons explicatifs nécessaires manquent. La question du libre arbitre, je le vois en feuilletant les pages qui précèdent, n'émerge qu'incidemment de son opinion selon laquelle les nouvelles découvertes groupées autour de la théorie des quanta n'entraînent pas de changement fondamental en physique. Si l'on tend maintenant à considérer les lois comme statistiques — auquel cas il n'y a ni "causalité stricte", ni déterminisme — rien ne prouve cependant qu'elles ne puissent pas être considérées comme dynamiques — ce qui pourrait même être avantageux — auquel cas le déterminisme demeure valide; l'incertitude du comportement individuel (électrons, quanta) n'ébranle pas réellement le déterminisme, mais ne fait qu'y introduire un nouvel élément. Telle semble être, à première vue, sa position. Certains penseurs scientifiques considèrent cette incertitude du comportement individuel comme un facteur physique correspondant à l'élément de libre arbitre dans les individus humains. C'est à ce propos que Planck introduit la question du libre arbitre pour réfuter la conclusion selon laquelle il affecte la stricte causalité et la loi du déterminisme. À ce que je crois comprendre, son argumentation est la suivante:
1. La loi de stricte causalité est valide parce que toute action ou événement intérieur chez l'être humain individuel est une conséquence entièrement déterminée par deux causes: (a) l'état antérieur de son mental pris dans son ensemble; (b) les influences extérieures.
2. La volonté est un processus mental entièrement déterminé par ces deux facteurs; par conséquent elle n'est pas libre, elle fait partie de la chaîne de la stricte causalité, comme aussi les résultats du libre arbitre.
3. L'important, ce n'est pas la liberté réelle de la volonté, mais la conscience qu'a l'homme de sa liberté. Cette conscience donne lieu à l'expérience intérieure d'un mobile conscient qui, à son tour, donne lieu à de nouveaux mobiles, et ainsi de suite indéfiniment. Pour cette raison, il est impossible à un homme de prédire son action future, car à tout moment un nouveau mobile peut se présenter. Mais quand nous nous reportons au passé, alors l'enchaînement des causes et des effets devient visible.
4. Le fait (ou du moins la théorie) de la stricte causalité n'est donc pas ébranlé par la conscience du libre arbitre dans l'individu. Il est seulement obscurci par le fait qu'un homme ne peut pas prédire ses propres actions ni saisir les causes de son état actuel; mais c'est parce qu'ici, sujet et objet se confondent, et ce sujet-objet est dans un état d'oscillation constante, à la différence d'un objet extérieur qui n'est pas censé changer en fonction des mouvements intérieurs de l'observateur.
Il y a une référence à la loi causale et à la loi morale qui me déconcerte. La "loi morale" est-elle quelque chose d'extérieur au strict enchaînement des effets et des causes? Une telle chose existe-t-elle? Si la "stricte causalité" régit tout, que fait donc là cette loi morale?
Telle est l'argumentation, ou ce que je puis en comprendre, mais elle ne me semble pas très concluante. Si la conduite d'un homme ne peut pas être prédite par lui-même, elle ne peut pas non plus l'être par quelqu'un d'autre, bien qu'alors le sujet et l'objet soient distincts; si elle n'est pas prévisible, ce doit être pour la même raison: l'élément de libre arbitre et la mobilité créée par la possibilité d'intrusion indéfinie de nouveaux mobiles. S'il en est ainsi, la stricte causalité ne peut pas être affirmée — bien qu'une causalité souple, dans laquelle le pouvoir de choix que nous appelons libre arbitre est un élément (soit l'une parmi de nombreuses causes afférentes, soit l'instrument d'une cause plus lointaine) puisse cependant être considérée comme possible.
Le postulat selon lequel l'action de l'individu est strictement déterminée par la totalité de son état mental, plus les influences extérieures, est douteux et ne mène pas très loin. Il est possible de saper toute la notion de causalité inévitable en soutenant que l'état total existant avant un événement n'est que la condition dans laquelle il se produit; il y a une masse d'antécédents et il y a une résultante, si l'on peut dire, ou une masse de résultantes, mais rien ne prouve que celles-ci soient des conséquences inévitables de la masse des antécédents. Il est possible que cet état total existant soit une matrice dans laquelle une semence d'événement est jetée ou devient active, de sorte que de nombreux résultats sont possibles, et dans le cas de l'action humaine il est concevable que le libre arbitre soit le facteur déterminant ou au moins l'un des facteurs déterminants.
Je ne pense pas, par conséquent, que ces arguments de Planck nous mènent très loin. Il y a aussi, évidemment, la question soulevée dans le livre lui-même de savoir si, le déterminisme étant admis, un état de choses localisé est un champ indépendant de causalité ou si tout est lié au point que c'est le tout qui détermine le résultat local. L'action d'un homme serait alors déterminée par les forces universelles; son état d'esprit et son choix apparent feraient partie des instruments de la Force universelle.
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Dans la question que vous soulevez au sujet de Socrate et de l'ivrogne invétéré, la distinction que vous faites est correcte. L'homme dont la volonté est faible est gouverné par ses impulsions vitales et physiques, son être mental n'est pas assez dynamique pour obliger sa volonté (celle de l'être mental) à les dominer. La volonté de cet homme n'est pas "libre", parce qu'elle n'est pas assez forte pour être libre, elle est l'esclave des forces qui agissent sur la nature vitale et physique de cet homme ou en elle. Dans le cas de Socrate, la volonté est libre au point qu'elle se tient au-dessus du jeu de ces forces, et il déterminé, par son idée et sa résolution mentales, ce qu'il fera ou ne fera pas. Reste la question de savoir si la volonté de Socrate n'est libre que dans ce sens, étant déterminée elle-même en réalité par quelque chose de plus vaste que la mentalité de Socrate, quelque chose dont elle est l'instrument — que ce soit une Force universelle ou un Être en lui dont son démon était la voix et qui non seulement donnait à son mental cette perception décisive de l'idéal mental, mais le poussait impérativement à agir en obéissant à cette perception. Ou elle pouvait être soumise à une connexion entre le Pourousha intérieur et la Force universelle. Dans ce dernier cas, il y aurait eu un équilibre instable entre le déterminisme de la Nature et une auto-détermination venant de l'intérieur. Si nous partons du point de vue du Sâmkhya, cet être (c'est-à-dire celui dont son démon était la voix) serait l'âme ou Pourousha; et dans Socrate, avec sa volonté puissante, autant que dans l'homme à la volonté faible, esclave de son impulsion vitale, l'action et ses résultats seraient déterminés par l'assentiment ou le refus du Pourousha. Dans le second cas, le Pourousha donne son consentement au jeu des forces de la nature, à l'habitude de l'impulsion vitale, et les subit par une soumission vitale tandis que le mental observe, impuissant. En Socrate, le Pourousha a commencé à s'émanciper et à décider ce qu'il acceptera ou n'acceptera pas; l'être conscient a commencé à s'imposer aux forces qui agissent sur lui. Cette maîtrise est devenue si complète qu'il peut en grande partie déterminer ses propres actions et peut même, dans certaines limites, non seulement en prévoir, mais en fixer les résultats, de sorte que ce qu'il veut se produira tôt ou tard.
Le Surhomme, pour sa part, est l'être conscient dont l'émancipation est complète parce qu'il s'est élevé à une position au-delà des limites du mental. Il peut déterminer son action en complet accord avec une perception qui voit toutes les forces agissant sur lui, en lui et autour de lui, et il est capable, au lieu de les subir, de les utiliser et même de les déterminer.
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Après avoir lu l'exposé convaincant de X, j'ai vu ce que l'on pourrait dire, du point de vue intellectuel, sur cette question, pour relier la réalité de la liberté suprême au phénomène du Déterminisme de la Nature — d'une manière différente de la sienne, mais avec le même objectif. En réalité, la liberté et le déterminisme sont seulement deux aspects de la même chose, car la vérité fondamentale est l'auto-détermination du cosmos et, en elle, une auto-détermination secrète de l'individu. La difficulté provient du fait que nous vivons dans le mental superficiel d'ignorance, ne savons pas ce qui se passe à l'arrière-plan et voyons seulement le processus phénoménal de la Nature. Là, le fait apparent est un déterminisme écrasant de la Nature, et comme notre conscience de surface fait partie de ce processus, nous sommes incapables de voir l'autre terme de la réalité à la fois double et unique. Pratiquement, il y a à la surface un déterminisme complet dans la Matière — bien que cela soit maintenant contesté par l'école scientifique la plus récente. À mesure qu'émerge la Vie, une certaine plasticité s'établit, de sorte qu'il est difficile de prédire exactement quoi que ce soit, comme on prédit les choses matérielles qui obéissent à une loi rigide. Cette plasticité augmente avec la croissance du Mental, si bien que l'homme peut avoir le sentiment d'un libre arbitre d'un choix dans son action, d'un mouvement propre qui aide au moins à déterminer lés circonstances. Mais cette liberté est douteuse parce qu'on peut dire qu'elle est une illusion, un artifice de la Nature, une partie de son mécanisme déterministe, seulement une liberté apparente ou tout au plus une indépendance restreinte, relative et subordonnée. C'est seulement quand on passe à l'arrière-plan en s'éloignant de la Prakriti pour aller vers le Pourousha et en s'élevant du Mental au Moi spirituel que l'aspect de liberté apparaît d'abord comme évident, puis devient complet lorsqu'on est à l'unisson de la Volonté qui est au-dessus de la Nature.
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Toutes sortes de choses se présentent dans la vie. On ne peut pas prendre tout ce qui vient avec l'idée que c'est envoyé par le Divin. Il y a un choix, et le mauvais choix entraîne ses conséquences.
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Le Destin, au sens strict du terme, ne s'applique qu'à l'être extérieur tant qu'il vit dans l'Ignorance. Ce que nous appelons destin est seulement, en fait, le résultat de l'état actuel de l'être, de sa nature et des énergies qu'il a accumulées dans le passé, réagissant les unes sur les autres et déterminant ses entreprises actuelles et leurs résultats futurs. Mais dès que l'on prend le chemin de la vie spirituelle, cette ancienne destinée prédéterminée commence à céder du terrain. Alors intervient un nouveau facteur, la Grâce divine, l'aide d'une Force divine supérieure, autre que la force du Karma, qui peut soulever le sâdhak au-delà des possibilités actuelles de sa nature. La destinée spirituelle de chacun est alors le choix divin qui assure l'avenir. Le seul doute concerne les vicissitudes du chemin et le temps que prendra le voyage. C'est là que les forces hostiles, jouant sur les faiblesses de la nature passée, s'efforcent d'entraver la rapidité du progrès et de retarder l'accomplissement. Ceux qui tombent, ne tombent pas en raison des attaques des forces vitales, mais parce qu'ils se placent eux-mêmes du côté de la Force hostile et donnent la préférence à une ambition ou un désir vital (ambition, vanité, luxure, etc.) plutôt qu'à la siddhi spirituelle.
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Ni la Nature, ni le Destin, ni le Divin ne travaillent à la manière mentale, selon la loi du mental, ou conformément à ses normes; c'est pourquoi la Nature, le Destin, la voie du Divin demeurent un mystère même pour l'homme de science et le philosophe. La Mère n'agit pas selon le mental; il est donc vain de se servir du mental pour juger son action.
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La nature est, dans une très large mesure, ce que vous en faites ou ce que vous pouvez en faire.
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Chacun a son propre destin et entrer dans une famille particulière pour une vie n'est qu'un incident.
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La conscience n'est pas une mécanique sans vie qu'on peut* découper de cette façon. L'influence de l'hérédité crée une affinité et l'affinité est une chose durable. C'est seulement quand la partie héréditaire est changée que l'affinité cesse.
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[Empreinte de l'hérédité, de la race, de la caste et de la famille:] C'est, dans la plupart des cas, une empreinte très forte — une empreinte qui marque principalement le vital physique et le physique matériel — et elle s'accroît par l'éducation et la manière dont on a été élevé.
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Bien des choses dans le corps et certaines dans le mental et le vital sont héritées du père et de la mère, ou d'autres ancêtres — cela, tout le monde est censé le savoir. D'autres choses ne sont pas héréditaires, mais particulières à la nature de chacun, ou élaborées par les événements de cette vie-ci.
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Le Karma et l'hérédité sont les deux causes principales [qui¦ déterminent le tempérament à la naissance]. Selon certains, ' l'hérédité aussi est soumise au Karma, mais peut-être seulement d'une manière générale, non dans tous les détails.
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Toutes les énergies mises en action — pensée, parole, sentiments, actes — entrent dans la composition du Karma. Ces choses aident à développer la nature dans une direction ou une autre, et la nature et ses actions et réactions produisent leurs conséquences à l'intérieur et à l'extérieur: elles agissent aussi sur les autres et créent, dans la somme générale des forces, des mouvements qui peuvent aussi sortir comme des forces et produire leurs effets. C'est une erreur de croire qu'une pensée ou une volonté ne peut avoir d'effet que lorsqu'elle est exprimée en parole ou en acte: la pensée muette, la volonté inexprimée sont aussi des énergies actives et peuvent produire leurs propres vibrations, leurs propres effets ou réactions.
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Exactement? Comment peut-on mesurer exactement où interviennent le facteur vital, le facteur mental, et le facteur spirituel? Dans le cas d'une étoile ou d'un atome c'est possible (mais non, semble-t-il, dans le cas d'un électron), mais pas pour un homme et son mental, son âme, son corps vivants.
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Ce que dit X est vrai, le jeu des forces est très complexe; on doit en être conscient et, pour ainsi dire, voir et regarder comment elles fonctionnent avant de pouvoir véritablement comprendre pourquoi les choses se produisent comme elles le font. Toute action est entourée d'un complexe de forces, et si l'on émet une force pour qu'une action réussisse, on doit prendre grand soin de le faire complètement, d'entretenir cette force, et de ne laisser aucune porte ouverte par où d'autres forces contraires pourraient s'introduire. Chaque homme est lui-même le champ de nombreuses forces; certaines travaillent pour sa sâdhanâ, d'autres pour son ego et ses désirs. Il y a par ailleurs des pouvoirs qui cherchent à faire d'un homme, à son insu, l'instrument de desseins qui ne sont pas siens. Tout cela peut se combiner pour amener un résultat particulier. Chacune de ces forces travaille pour réaliser sa propre impulsion; elles ne sont pas nécessairement ce que nous appelons des forces hostiles, ce sont tout simplement des forces de la Nature.
Le sentiment de jalousie et d'abhimāna était évidemment une survivance des mouvements passés de la nature. C'est ainsi que ces choses sortent si elles sont rejetées: elles perdent de la force, sont de moins en moins capables de rester, de moins en moins capables d'affecter la conscience; finalement, elles ne peuvent plus nous toucher et par conséquent ne viennent plus.
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Tous ceux qui, dotés d'intelligence et de pouvoir d'observation, vivent plutôt dans une conscience intérieure, peuvent voir à chaque pas le jeu de forces invisibles qui agissent sur les hommes et produisent les événements sans que ceux-ci sachent par quels moyens. La différence créée par le yoga ou une conscience intérieure — car il y a des gens, comme Socrate, qui élaborent ou ont une conscience intérieure sans yoga — c'est que l'on devient conscient de ces forces invisibles et que l'on peut aussi, consciemment, en profiter ou les utiliser et les diriger. C'est tout.
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[Échange vital:] C'est difficile de préciser. Dans toute association humaine, l'un attire toujours les forces vitales de l'autre, et cela se produit automatiquement. L'amour est l'un des moyens les plus puissants pour chacun d'attirer la force vitale de l'autre, ou pour l'un d'attirer celle de l'autre, car souvent aussi cela se produit dans un seul sens, au grand détriment de l' "autre". Au moment de ce passage interviennent beaucoup de choses bonnes et mauvaises, exaltation, sentiment de force et de soutien, infiltration de qualités bonnes et mauvaises, échanges d'humeurs, d'états et de mouvements psychologiques, dépression, épuisement — toute la gamme. Les gens ne le savent pas — c'est là un effet de la miséricorde divine — mais quand on entre dans une certaine conscience yoguique, on devient tout à fait conscient et très sensible à tout cet échange, à cette action et à cette réaction, mais on peut aussi dresser un mur contre cela, le rejeter, etc.
C'est un mur de conscience qu'il faut construire. La conscience n'est pas quelque chose d'abstrait, c'est, comme l'existence elle-même, ou l'Ânanda, ou le mental, ou le prāṇa, quelque chose de très concret. Si l'on s'éveille à la conscience intérieure, on peut faire toutes sortes de choses avec elle, l'envoyer au-dehors comme un courant de force, ériger un cercle ou un mur de conscience autour de soi, diriger une idée pour qu'elle entre dans la tête de quelqu'un en Amérique, etc., etc.
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Sa nouvelle conscience lui fait ressentir plus fortement les forces contraires avec lesquelles on entre en contact quand on va dans le monde, qu'on doit traiter des affaires, rencontrer des gens, et il a peur d'une réaction dans le vital qui perturberait sa sâdhanâ ou créerait des difficultés. C'est évidemment un homme qui est ou est devenu psychiquement sensible à ce jeu de forces que vous refusez aveuglément de reconnaître, même quand vous êtes en plein dedans. Vous pouvez sentir l'atmosphère de votre ami à travers sa lettre "si belle, si réconfortante, si rafraîchissante", et elle a sur vous un effet immédiat. Mais votre mental regarde fixement comme une chouette et se demande: "Qu'est-ce que c'est donc que cela?" parce que, je suppose, vos livres de médecine ne vous en ont jamais parlé, et comment une chose pourrait-elle être vraie si elle n'est pas connue du mental ordinaire ou de la science? C'est par une incursion de forces appartenant à une espèce contraire que vous tombez entre les griffes du Démon, mais vous ne pouvez que geindre et crier: "Qu'est-ce que c'est que ça?", et quand elles sont balayées en un instant par d'autres forces, cligner des yeux et murmurer: "Tiens, c'est drôle! " Quand votre ami est menacé par les forces contraires, il peut le sentir et le savoir aussitôt, et ainsi se mettre sur ses gardes et résister au Diable, parce qu'il peut détecter là immédiatement l'une de ses principales lignes d'attaque.
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Cette conscience [de l'influence des gens] a pour but d'amener la connaissance — une connaissance psycho-occulte nécessaire à la plénitude de la conscience et de l'expérience. Le but n'est pas de laisser ce qui est ressenti devenir une influence, bonne ou mauvaise.
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En ce qui concerne l'autre question, il faut distinguer deux choses. Certaines personnes ont la faculté de recevoir des impressions concernant les autres, faculté qui n'est en aucune manière infaillible, mais se révèle souvent exacte. Ça, c'est une chose, et l'intuition yoguique, par laquelle on sait ou sent directement ce qu'est un homme, quelles sont ses capacités, son caractère, son tempérament, en est une autre. La première peut aider à développer la seconde, mais ce n'est pas la même faculté. La faculté yoguique doit être complète et ne peut le devenir que par un grand développement de la conscience intérieure.
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Mise à part la question de Divin ou non divin, aucun homme spirituel qui agit dynamiquement n'est limité au contact physique: l'idée que le contact physique par l'écriture, la parole, les rencontres est indispensable à l'action de la force spirituelle est une contradiction en soi, car alors cette force ne serait pas spirituelle. L'esprit n'est pas limité par les objets physiques ou par le corps. Si vous avez la force spirituelle, elle peut agir à des milliers de kilomètres de distance, sur des gens qui ne savent pas et ne sauront jamais que vous agissez sur eux ni même que quelqu'un agit sur eux — ils savent seulement qu'il y a une force qui les rend capables de faire des choses et peuvent fort bien supposer que c'est leur grande énergie et leur génie.
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Les Forces divines sont faites pour être utilisées; l'erreur de l'homme individualisé dans l'Ignorance est de s'en servir pour l'ego et non pour le Divin. C'est cela qui doit être rectifié par l'union avec la Conscience divine, et aussi par l'élargissement de l'être individuel afin qu'il puisse vivre consciemment dans l'universel. C'est difficile à cause de l'habitude figée de l'ego, mais ce n'est pas impossible.
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Toute les forces viennent du Divin, mais elles sont plus fréquemment mal employées qu'utilisées spirituellement ou correctement.
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762
Il est certainement possible d'avoir conscience des choses à distance et d'intervenir.
L'idée que les yogi n'utilisent pas ou ne devraient pas utiliser ces pouvoirs, je la considère comme une superstition ascétique. Je crois que tous les yogi qui ont ces pouvoirs les utilisent chaque fois qu'ils se trouvent appelés de l'intérieur à le faire. Ils peuvent s'en abstenir, s'ils pensent que leur utilisation, dans un cas particulier, est contraire à la Volonté divine, ou s'ils voient qu'empêcher un mal ouvrirait la porte à un mal pire, ou pour toute autre raison valable, mais non en raison d'une quelconque interdiction réglementaire et générale. Ce qui est interdit à tous ceux qui ont un fort sens spirituel, c'est d'être un thaumaturge, d'accomplir des choses extraordinaires pour se donner en spectacle, pour l'argent, pour la renommée, par vanité ou par orgueil. Il est interdit d'utiliser ces pouvoirs pour de simples motifs vitaux, pour en faire une ostentation asourique ou pour les transformer en support de l'arrogance, de l'amour-propre, de l'ambition ou de l'une ou l'autre des aimables faiblesses auxquelles la nature humaine est encline. C'est parce que certains yogi encore mal dégrossis tombent si souvent dans ce piège des forces hostiles que l'usage des pouvoirs yoguiques est parfois déconseillé, étant donné qu'ils peuvent nuire à celui qui les utilise.
Mais ce sont surtout les gens qui vivent beaucoup dans le vital qui tombent ainsi; avec un mental calme, fort et libre, et un psychique éveillé et vivant, de telles petitesses n'apparaîtront vraisemblablement pas. Et pour ceux qui peuvent vivre dans la vraie Conscience divine, certains pouvoirs ne sont pas du tout des pouvoirs au sens courant du terme, c'est-à-dire ne sont ni surnaturels, ni anormaux, mais sont plutôt leur manière normale de voir et d'agir, font partie de la conscience — et pourquoi leur serait-il interdit d'agir, ou refuseraient-ils d'agir selon leur conscience et sa nature?
Je suppose que j'ai eu moi-même une éducation encore plus complètement européenne que la vôtre, et je suis passé aussi par une période de négation agnostique, mais dès l'instant où j'ai jeté un regard sur ces choses, je n'ai plus jamais pu prendre l'attitude de doute et d'incrédulité qui a été si longtemps à la mode en Europe. Les expériences et les pouvoirs anormaux, ou supra-physiques, occultes ou yoguiques, m'ont toujours paru parfaitement naturels et crédibles. La conscience, par sa nature même, ne peut être limitée par la conscience humaine animale ordinaire et physique, elle doit avoir d'autres domaines. Les pouvoirs yoguiques ou occultes ne sont pas plus surnaturels ou incroyables que n'est surnaturel ou incroyable le pouvoir d'écrire un grand poème ou de composer une grande musique; peu de gens peuvent le faire, en l'état actuel des choses — pas même un sur un million; car la poésie et la musique viennent de l'être intérieur, et pour écrire ou composer des œuvres grandes et vraies, le passage doit être libre entre le mental extérieur et quelque chose dans l'être intérieur. C'est pourquoi vous avez acquis le pouvoir poétique dès que vous avez abordé le yoga; la force yoguique a dégagé le passage. Il en est de même de la conscience yoguique et de ses pouvoirs; le problème est de déblayer le passage — car ils sont déjà en vous. Évidemment, la première chose est de croire, d'aspirer, et, avec la vraie impulsion intérieure, de faire l'effort.
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Jādū (la magie) est une pratique particulière à laquelle s'adonnent les magiciens professionnels ou ceux qui s'initient à l'art de la magie, mais elle ne fait pas partie du yoga. Ce qui arrive dans le yoga, c'est que parfois — ou même très couramment — certains pouvoirs se développent dans le sâdhak, par lesquels il peut influencer les autres, leur faire faire certaines choses ou produire certains événements à volonté. Ces pouvoirs, et d'autres pouvoirs yoguiques, le sâdhak ne devrait jamais en faire usage à des fins égoïstes ni pour satisfaire ses désirs vitaux. Ils ne peuvent être utilisés, quand ils deviennent une partie de la conscience divine réalisée, que par la Mère elle-même ou sur son ordre, à des fins bénéfiques et non égoïstes. Il n'y a rien de mauvais dans les pouvoirs yoguiques lorsqu'ils viennent naturellement, comme une partie de la nouvelle conscience, et ne sont pas déviés pour une fin personnelle. Par exemple, vous voyez quelque chose en vision ou en rêve, et cela se produit ensuite à l'état de veille. Eh bien, connaître les choses futures est un pouvoir yoguique de prévision, et cela se produit souvent quand la conscience grandit; il n'y a rien de mal à ce que cela arrive; c'est une partie de la croissance dans la sâdhanâ. De même pour les autres pouvoirs. Seulement il ne faut pas en être fier, ni s'en vanter, ni en mésuser pour satisfaire ses désirs, son orgueil, pour la puissance ou la satisfaction de l'ego.
Votre vision d'un homme ayant un feu à ses pieds était probablement une vision du Dieu Agni d'où jaillit le feu de la tapasyâ et de la purification dans la sâdhanâ.
Quand la sâdhanâ progresse, on acquiert presque toujours le pouvoir de vision; ce que l'on voit est vrai, si l'on reste dans la conscience juste. Il y a aussi des voix et des expériences fausses. Si certains sont devenus fous, c'est parce qu'ils étaient égoïstes, ont commencé à s'imaginer qu'ils étaient de grands sâdhak et à attacher une importance exagérée à leur propre personne et à leurs expériences; cela leur a donné une conscience fausse, des voix, des visions et des inspirations fausses. Ils leur ont donné tant d'importance qu'ils ont refusé d'écouter la Mère et finalement lui sont devenus hostiles parce qu'elle leur disait qu'ils étaient dans l'erreur et refrénait leurs aberrations. Vos visions et vos expériences sont très vraies et très bonnes, et je vous ai expliqué ce qu'elles signifiaient — des visions et des expériences fausses ont essayé de venir, mais vous les avez rejetées, parce que vous n'y étiez pas attaché et que vous êtes déterminé à poursuivre le vrai but de la sâdhanâ. On ne doit pas s'attacher à ces choses, mais les observer avec simplicité et continuer; alors elles deviennent une aide et ne peuvent pas être un danger.
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764
La magie noire, c'est l'occultisme des pouvoirs adverses — l'occultisme des Pouvoirs divins est tout différent. L'un se fonde sur l'unité, l'autre sur la division.
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C'est difficile à dire [pourquoi le Christ guérissait les malades] — il semblerait, à ce qu'en dit la Bible, qu'il le faisait pour montrer qu'il était quelqu'un que le Divin avait envoyé avec le pouvoir.
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Vous avez raison. Elle [Mme Blavatsky] était une occultiste, non une personnalité spirituelle. L'enseignement spirituel qu'elle donnait semble avoir reposé sur une connaissance intellectuelle et non sur une réalisation. Son attitude était celle du bouddhisme tibétain. Elle ne croyait pas en Dieu, mais au Nirvana, aux pouvoirs miraculeux et aux Mahatma.
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Il est impossible d'accorder un crédit quelconque aux histoires qu'on raconte sur ce Swami... Il a peut-être pratiqué un genre de yoga tantrique et obtenu quelques pouvoirs occultes, mais dans tout ce que vous avez dit de lui et dans ce qui a été imprimé, il n'y a pas la moindre trace de réalisation ou d'expérience spirituelle. Il ne semble penser à rien d'autre qu'aux pouvoirs occultes et aux prouesses de la thaumaturgie, Ceux qui se fondent sur des pouvoirs occultes dissociés des expériences spirituelles n'ont pas atteint un haut niveau de réalisation dans le yoga. Il existe des yogi qui se conduisent comme s'ils n'avaient aucun contrôle d'eux-mêmes — selon leur théorie, ils séparent l'esprit de la nature et vivent dans leur réalisation intérieure, abandonnant la nature à une action désordonnée "comme un enfant, un fou, un piśāca ou un objet inerte". D'autres usent délibérément d'un langage grossier ou violent pour tenir les gens à distance ou les éprouver. Mais la crise de rage de ce Swami, telle que vous la racontez, semble avoir été simplement un éclat de fureur dû à un égoïsme offensé. Son jugement sur Ramana Maharshi est aux limites de l'absurde.1 S'il a demandé un ongle, un cheveu, etc., et a offert des vêtements ou une chemise, c'était probablement afin d'établir un lien physique pour projeter une influence occulte sur vous et votre femme, peut-être à l'aide d'un kriyā tantrique ou magique — au Tibet ces procédés magiques sont bien connus et couramment employés.
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768
Je ne sais pas si je peux jeter une lumière sur les expériences mystiques de Mme X. La description, au moins dans sa dernière partie, n'est pas très facile à suivre, car elle procède la plupart du temps par allusions et n'est pas toujours assez précise pour être claire. La première partie de l'expérience indique un pouvoir de guérison inné, dont elle-même ignore comment il opère. D'après ce qu'elle en dit, ce pouvoir semble venir de quelque chose en elle qui doit être, selon les termes qu'elle emploie, une conscience plus vaste, plus haute, plus lumineuse, plus puissante, avec laquelle elle est de temps en temps en communion, mais dans laquelle elle ne vit pas constamment. Par ailleurs, une autre phrase semble indiquer qu'une Divinité ou une Présence divine lui donne l'ordre de guider les autres pour que leur conscience puisse grandir. Toutefois elle en parle clairement comme d'un plus grand "je" se tenant derrière une force ayant la couleur d'un diamant bleu. Nous devons donc nous rabattre sur l'idée d'une conscience plus grande située très haut, avec le sentiment de quelque chose de divin, l'impression d'une lumière considérable et d'une autorité spirituelle — peut-être dans l'un de ces plans supérieurs du mental spirituel dont je parle dans La Vie divine et les Lettres. La lumière couleur de diamant bleu pourrait fort bien appartenir à ces plans; elle est généralement blanche, mais là elle pourrait fort bien être bleue; c'est une lumière qui disperse ou chasse tout ce qui est impur, particulièrement la possession démoniaque ou l'influence d'une force mauvaise. De toute évidence, l'utilisateur d'un pouvoir comme celui-ci devrait se garder soigneusement de l'intrusion d'un élément d'erreur comme l'amour personnel du pouvoir, mais il ne faudrait pas que cela donne lieu à une appréhension quelconque, puisqu'un regard pénétrant porté en soi-même suffirait à rejeter cet élément ou à le maintenir à distance. Je pense que c'est tout ce que je peux en dire sur la base des renseignements donnés dans sa lettre.
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Sur le spiritisme, voici ce que je crois pouvoir dire pour le moment. Il est tout à fait possible que les morts (ou plutôt ceux qui sont partis, car ils ne sont pas morts), lorsqu'ils sont encore dans les régions proches de la terre, communiquent avec les vivants; parfois cela se produit automatiquement, parfois par un effort de communication d'un côté ou de l'autre du rideau. Cette communication, par les moyens qu'utilisent les spirites, n'est pas du tout impossible; d'habitude, cependant, les communications authentiques, ou un contact, ne peuvent se produire qu'avec ceux qui sont encore dans un monde où existe une sorte de réplique idéalisée de la conscience terrestre et où persistent une personnalité, des idées, des souvenirs identiques à ceux que la personne avait ici. Mais toutes les prétendues communications avec les âmes des défunts ne sont pas authentiques, notamment quand elles se font par l'intermédiaire d'un médium professionnel rémunéré. Il y a là une énorme part de mélange d'un genre très indésirable — car en plus de la multitude de suggestions inconscientes venant des participants et des apports de la conscience subliminale du médium, on entre en contact avec un monde d'êtres qui est par nature illusoire, très trompeur ou qui incite à se leurrer soi-même. Ces êtres viennent en grand nombre proclamer qu'ils sont les âmes de certains défunts: parents, amis, hommes connus, personnalités célèbres, etc. Il y a aussi des êtres qui recueillent les sentiments et les souvenirs abandonnés par les morts et s'en affublent. Un grand nombre d'êtres viennent à ces séances uniquement pour jouer avec la conscience des hommes ou exercer leurs pouvoirs par ce contact avec la terre, et qui dupent les médiums et les participants par leurs mensonges, leurs tours et leurs illusions. (Je prends évidemment le cas de médiums qui ne sont pas eux-mêmes des escrocs. ) Le contact avec l'un de ces plans spirites peut être nuisible (la plupart des médiums deviennent des déséquilibrés nerveux ou moraux) et spirituellement dangereux. Évidemment, toutes les prétendues communications avec les morts célèbres des époques lointaines sont, par leur nature même, trompeuses comme la plupart de celles qui concernent des célébrités plus récentes — c'est une évidence qui ressort de la nature même de ces communications. On peut, par l'intermédiaire des médiums consciencieux, obtenir des résultats valables (en ce qui concerne les morts), mais ces médiums sont eux-mêmes très ignorants de la nature des forces qu'ils manipulent et n'ont aucune discrimination qui puisse les prémunir contre les supercheries venant de l'autre côté du voile. Ces séances ne peuvent apporter que très peu de connaissance authentique sur la nature de la vie future après la mort; une vraie connaissance est plus souvent acquise par l'expérience des individus qui établissent sérieusement le contact ou sont capables, d'une manière ou d'une autre, de passer la frontière.
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770
[Médiums et voyantes] Ils sont pour la plupart en contact avec des mondes du physique vital ou du physique subtil et ne reçoivent absolument rien de plus élevé.
771
Le point de vue adopté par le Mahatma en ces matières est chrétien plutôt qu'hindou — pour le chrétien, s'abaisser, être humble, accepter un état inférieur pour servir l'humanité ou le Divin sont choses hautement spirituelles et le plus noble privilège de l'âme. Cette manière de voir n'admet aucune hiérarchie des castes; le Mahatma admet les castes, mais considère qu'elles sont toutes égales devant le Divin; un Bhangi accomplissant son Dharma vaut bien un Brahmine qui accomplit le sien, il y a division entre les fonctions mais non hiérarchie des fonctions. C'est une vision des choses, et la vision hiérarchique en est une autre; toutes deux ont un point de vue et une logique qui leur sont propres et que le mental considère valables en totalité, mais qui ne correspondent qu'à une partie de la réalité. Toutes sortes de travaux sont égaux devant le Divin, et tous les hommes ont en eux le même Brahman: c'est une vérité; mais le fait que tous ne sont pas également développés en est une autre. L'idée qu'un certain puṇya spécial est nécessaire pour naître Bhangi est, évidemment, l'une de ces exagérations vigoureuses qui sont familières au Mahatma et impressionnent grandement le mental de ses auditeurs. L'idée derrière cela, est que la fonction du Bhangi rend un service indispensable à la société, tout autant que celle du Brahmine, mais comme elle est déplaisante, il faudrait un héroïsme moral spécial pour la choisir volontairement, et le Mahatma raisonne comme si l'âme la choisissait librement comme un service héroïque, comme la récompense d'actes vertueux — mais c'est peu vraisemblable. Le service de l'éboueur est indispensable dans certaines conditions sociales, c'est l'une de ces nécessités primordiales sans lesquelles la société peut difficilement exister, sans lesquelles le développement culturel dont la vie du Brahmine fait partie n'aurait pu avoir lieu. Il est toutefois évident que le développement culturel a plus de valeur que les services pourvoyant aux besoins physiques pour le progrès de l'humanité, par opposition à sa condition statique première, et ce développement peut même conduire à minimiser et peut-être à faire disparaître entièrement, par les inventions scientifiques, la nécessité de la fonction de l'éboueur. Mais je suppose que le Mahatma n'approuverait pas cette solution, puisqu'elle entraînerait l'utilisation de machines et s'écarterait de la vie simple. Quoi qu'il en soit, il n'est pas vrai que la vie du Bhangi soit supérieure à la vie du Brahmine, et qu'elle soit la récompense d'une vertu spéciale. D'autre part, la conception traditionnelle selon laquelle un homme est supérieur aux autres parce qu'il est né Brahmine n'est ni rationnelle ni justifiable. Un homme spirituel ou cultivé, paria de naissance, est supérieur en valeurs divines à un homme non spirituel et attaché aux choses de ce monde, ou à un Brahmine grossier et non cultivé. La naissance compte, mais la valeur fondamentale réside dans l'homme lui-même, dans l'âme à l'arrière-plan, et dans la mesure où cette âme se manifeste dans nature.
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772
Le sacrifice a toujours une valeur morale et psychologique. Cette valeur est la même quelle que soit la cause pour laquelle est accompli le sacrifice, pourvu que celui qui le fait croie à la vérité de sa cause, ou à sa justice, ou à toute autre valeur. Si l'on fait le sacrifice pour une cause que l'on sait être mauvaise ou sans valeur, tout dépend du motif et de l'esprit du sacrifice. Bhishma acceptant la mort pour une cause qu'il savait être injuste obéissait à l'appel de la loyauté envers ce qu'il ressentait comme son devoir personnel. Nombreux sont ceux qui l'ont fait dans le passé, et la valeur morale et psychique de leur acte réside, quelle que soit la nature de la cause, dans la noblesse du mobile.
Quant au mot "sacrifice" pris dans un autre sens, l'homme n'en fait aucun lorsqu'il renonce à une chose à laquelle il n'accorde pas de valeur — sauf dans la mesure où il subit une perte, brave l'opinion publique ou risque l'opprobre, ou de quelque manière paie le prix de sa libération. Je puis dire, cependant, que sans être froid et indifférent, un homme peut être saisi par un appel spirituel ou par l'appel d'une grande cause humaine au point que les liens familiaux ou autres ne comptent pour rien à côté, et alors il abandonne tout joyeusement, sans un serrement de cœur, pour suivre la Voix qui le somme de venir.
Dans le sens spirituel, cependant, le mot sacrifice a une signification différente: il désigne moins l'abandon de ce qui est cher qu'une offrande de soi, de son être, de son mental, de son cœur, de sa volonté, de son corps, de sa vie, de ses actions au Divin. Il a le sens étymologique de "rendre sacré" et est employé comme synonyme de yajña. Quand la Guîtâ parle du "sacrifice de la connaissance", cela ne consiste pas à renoncer à quoi que ce soit, mais à orienter le mental vers le Divin pour chercher la connaissance et à s'offrir à travers elle. C'est dans ce sens aussi que l'on parle de l'offrande ou du sacrifice des œuvres. La Mère a écrit quelque part que le sacrifice spirituel est par nature joyeux, et non pénible. Sur le sentier spirituel, très couramment, si un chercheur sent encore fortement les liens anciens et les anciennes responsabilités, on ne lui demande pas de les briser ou de les abandonner, mais de laisser l'appel croître en lui jusqu'à ce que tout soit intérieurement prêt. En fait, nombreux sont ceux qui partent plus tôt parce qu'ils sentent que leur seule chance est de trancher les liens, et ceux-là doivent parfois passer par un conflit. Mais la douleur, le conflit ne sont pas le caractère essentiel de cette offrande spirituelle de soi.
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773
Cela signifie simplement que votre sacrifice est toujours mental et n'a pas encore acquis un caractère spirituel. Quand votre être vital consentira à abandonner ses désirs et ses jouissances, quand il s'offrira au Divin, le Yajna aura commencé. Ce que je voulais dire, c'est que le sens européen du mot n'est ni celui du mot "Yajna" ni le sens du mot "sacrifice" dans certaines expressions comme "le sacrifice des œuvres". Il ne signifie pas que vous devez abandonner toutes les œuvres pour le Divin — car alors il n'y aurait pas de sacrifice des œuvres du tout. De même le sacrifice de la connaissance ne signifie pas que vous devez, à grand'peine et résolument, devenir parfaitement idiot pour le Seigneur. Le sacrifice est une offrande intérieure au Divin et le vrai sacrifice spirituel est très joyeux. Autrement, on ne fait qu'essayer de se rendre apte au sacrifice et on n'a pas encore commencé le vrai Yajna. C'est parce que votre mental lutte avec votre vital, animal récalcitrant, et lui demande de se laisser immoler, qu'il y a douleur et conflit. Si la volonté spirituelle (ou psychique) était davantage au premier plan, vous ne vous lamenteriez pas sur la perte du ghee2 du beurre et du fromage jetés dans le Feu, vous n'essaieriez pas d'en avoir une dernière lichée avant de les répandre. La seule difficulté serait de faire descendre les dieux assez complètement (labeur progressif), non de regretter le ghee. En passant, croyez-vous que la Mère ou moi-même, ou d'autres, qui avons adopté la vie spirituelle n'aimions pas la vie, et que c'est pour cette raison que la Mère peut dire que la joie du sacrifice au Divin est le véritable esprit du sacrifice spirituel? Ou croyez-vous que nous avons passé les premiers stades à regretter les oignons d'Egypte, et que c'est seulement plus tard que nous avons senti la joie du sacrifice spirituel? Évidemment non: nous, et bien d'autres, n'avons eu aucune difficulté à abandonner tout ce que nous jugions nécessaire d'abandonner, et aucune nostalgie ensuite. Votre règle est, comme d'habitude, une règle rigide qui ne s'applique pas du tout généralement.
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774
Le sacrifice dépend de l'attitude intérieure. Si l'on n'a rien d'extérieur à sacrifier, on peut toujours se donner soi-même.
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775
Il n'y a rien de noble dans le fanatisme — le motif n'est pas noble, bien qu'il puisse contenir un ardent enthousiasme. Le fanatisme religieux est, psychologiquement, de basse origine et ignorant — et habituellement, dans son action, il est féroce, cruel et bas. L'ardeur religieuse comme celle du martyr qui ne sacrifie que lui-même est différente.
776
La guerre a été presque continuelle dans le monde — comme dans l'histoire de la République romaine où les portes du temple de Janus n'ont été fermées qu'une ou deux fois au cours des nombreux siècles de son existence, signe que la République était en paix avec le monde entier. Dans les temps modernes, il y a eu de longs intervalles de paix entre de longues guerres, mais de petites guerres se poursuivaient généralement ici ou là. L'homme est un animal querelleur et batailleur, et tant qu'il sera ainsi comment la paix pourrait-elle régner?
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777
La guerre et la conquête font partie de l'économie de la Nature vitale, et il est inutile de blâmer tel ou tel peuple parce qu'il s'y livre — tous en font autant quand ils en ont le pouvoir et l'occasion. La Chine, qui se plaint maintenant, a été un pays impérialiste et colonialiste pendant des siècles, alors qu'à l'époque le Japon se tenait religieusement à l'intérieur de ses frontières... Si la guerre n'était pas profitable, je suppose que personne ne la ferait. L'Angleterre a fait fortune en pillant les richesses de l'Inde, la France dépend pour beaucoup de ses colonies d'Afrique. Le Japon a besoin d'un débouché pour sa population surabondante et de marchés économiques sûrs à proximité. Chaque pays est poussé par des forces qui utilisent le mental des gouvernants et des peuples pour s'accomplir; à moins que la nature humaine ne change, ce n'est pas en prêchant la morale qu'on l'empêchera.
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778
Je préférerais éviter toute controverse publique, surtout si elle touche le moins du monde à la politique. Les théories de Gandhi sont, comme d'autres théories mentales, bâties sur un raisonnement unilatéral, et elles revendiquent pour une vérité limitée (non-violence et résistance passive) une universalité qu'elle ne peut avoir. Des théories comme celle-ci, il en existera tant que le mental sera l'instrument principal des humains dans leur recherche de la vérité. Dépenser de l'énergie pour essayer de les détruire est de peu d'utilité; si elles sont détruites, elles sont remplacées par d'autres tout aussi limitées et partielles.
Rien de nouveau dans l'impérialisme — il est aussi vieux que le vital humain; à aucune époque, dans l'histoire connue de l'homme, il n'a cessé d'exister. Pour en sortir, il faudrait changer la nature humaine ou au moins la refréner par un pouvoir supérieur. Notre travail n'est pas de combattre tout cela, mais de faire descendre une nature supérieure et une création-de-Vérité qui feront de la Lumière et du Pouvoir spirituels la force principale dans l'existence terrestre.
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779
Il y une vérité dans l'Ahimsâ, il y a une vérité dans la destruction aussi. Je n'enseigne pas que vous devriez prendre pour dharma spirituel de tuer tout le monde chaque jour. Je dis que la destruction peut être accomplie, quand elle fait partie du travail divin, ordonné par le Divin. La non-violence est meilleure que la violence en règle générale, et pourtant quelquefois la violence peut être la chose à faire. Je considère que le dharma est relatif, et que l'unité avec le Divin et l'action venant de la Volonté divine est la voie la plus haute. Bouddha n'avait pas pour but l'action dans le monde, mais la cessation de l'existence dans le monde. Pour cela, il a trouvé que l'Octuple Sentier était une discipline préparatoire nécessaire, et c'est ce qu'il a proclamé.
Cela [l'Ahimsâ] n'a rien à voir avec le yoga, mais concerne le sentier vers la libération découvert par Bouddha. Les sentiers sont nombreux, et il n'y a pas de raison que tous les instructeurs propagent un seul et même enseignement.
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780
[À propos de la vivisection:] J'ai envie de m'échapper de l'arène ou de me réfugier dans la formule habituelle et salvatrice: "II y a beaucoup à dire pour et contre. " Votre opinion est sans aucun doute correcte du point de vue du bon sens ou de ce qu'on pourrait appeler le point de vue "humanitaire". Selon Krishnaprem, nous devons non seulement tenir compte du bien temporaire pour l'humanité, mais aussi de certaines lois intérieures. Il pense que le mal. la violence, ou la cruauté envers d'autres êtres n'est pas compensée, ne peut pas être justifiée par un certain bien physique s'adressant à une section de l'humanité ou même à l'humanité tout entière; de telles méthodes provoquent, selon lui, une sorte de réaction karmique, sans compter le mal moral qu'elles infligent aux hommes qui les pratiquent. Il est aussi d'avis que la cause de la maladie est psychique, c'est-à-dire subjective, et que la recherche doit se diriger ver la guérison des causes intérieures plutôt que vers un ravaudage par des moyens physiques. Ces idées contiennent aussi leur vérité. Je reconnais pleinement la loi psychique et ses méthodes, et le fait que celles-ci sont préférables, mais le commun des mortels n'est pas prêt pour cela, et tant qu'il en sera ainsi, les médecins et leurs méthodes physiques persisteront. J'ai aussi soutenu la légitimité de la violence dans les cas où elle se justifie, comme Kouroukshétra et la guerre contre Hitler et tout ce qu'il représente. La question est donc, de ce point de vue mitigé, de savoir si, dans l'immédiat, la violence est légitime, et si l'occasion la justifie. Je me récuse.
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781
La destruction n'est, en elle-même, ni bonne ni mauvaise. C'est un fait de la Nature, une nécessité dans le jeu des forces, les choses étant ce qu'elles sont dans le monde. La lumière détruit l'Ombre et les Pouvoirs de l'Ombre, et ce n'est certes pas un mouvement de l'Ignorance!
Tout dépend de la nature de la destruction et des forces qui y interviennent. Toute peur du feu ou d'autres forces violentes doit être surmontée. Car la peur indique une faiblesse — l'esprit libre peut se tenir sans peur devant les forces de la Nature, même les plus grandes.
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782
Pourquoi les tremblements de terre seraient-ils la conséquence des mouvements faux de l'homme? Quand l'homme n'existait pas, n'y avait-il pas de tremblements de terre? Si l'homme était exterminé — par des gaz toxiques ou autrement — cesseraient-ils de se produire? Les tremblements de terre sont des perturbations de la Nature dues à une pression de forces; la fréquence des tremblements de terre peut coïncider avec de violents bouleversements dans la vie de l'humanité, mais les bouleversements de la terre et ceux de la vie humaine sont, les uns comme les autres, des conséquences d'un conflit général ou d'une pression générale des forces, les uns ne sont pas la cause des autres.
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783
Cela paraît très sot, ces jeûnes — comme s'ils pouvaient changer quoi que ce soit. Le jeûne peut tout au plus affecter l'état du jeûneur, mais comment pourrait-il "racheter" les actions des autres ou changer leur nature?
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784
Ce monde a émergé de l'Inconscience; elles [la pauvreté et la misère] sont des conséquences du fonctionnement imparfait du mental humain qui, étant né dans la vie et dans la matière ignorantes, doit apprendre par l'effort et l'expérience. Il faut que l'ignorance et l'ego soient dépassés pour que les ressources de la Nature trouvent une utilisation conforme à la Vérité.
785
Il se peut que la notion de temps soit une construction mentale, mais le sens du temps ne l'est peut-être pas. Les primitifs ont la notion du temps, mais en rapport avec le soleil, les étoiles et l'alternance des jours et des nuits, le déroulement des saisons; ce n'est peut-être pas une construction distincte — mais ce n'est pas sûr, car ils ont des conceptions métaphysiques qui leur sont propres. Je ne pense pas que la conscience des animaux soit aussi bornée que vous le dites — ils ont non seulement des sensations, mais une mémoire aiguë de certaines choses, un don d'observation, des associations d'idées claires, une intelligence qui élabore des plans, un sens très exact des lieux et la mémoire des lieux, un pouvoir de raisonnement primaire (non par la réflexion comme le mental humain, mais pratiquement, comme n'importe quel mental vital). J'ai vu un petit chat observer, parvenir à une conclusion correcte, entreprendre ce qui était nécessaire pour atteindre son but, nécessité imposée par cette conclusion, tout comme le ferait un enfant humain. Nous ne pouvons pas dire par conséquent que les animaux n'ont pas d'idées. Peut-être n'ont-ils pas la conception claire d'hier et de demain, mais ils ont la perception des besoins passés et futurs, et aussi de l'heure et des saisons — tout cela vitalement, pratiquement, non mentalement réfléchi à la manière humaine.
Mais il est vrai que lorsqu'on va au-delà du mental, ce sens du temps disparaît pour faire place à un éternel présent..
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786
[Sens du temps chez les animaux] Un sens du temps très fort — au moins chez certains d'entre eux — mais qui ordinairement n'agit qu'en fonction de désirs ou d'habitudes marquées: nourriture, par exemple.
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787
Sans aucun doute, la conscience physique de la mesure du temps appartient principalement à l'état de veille, mais elle peut être subliminale et en même temps appartenir à la conscience mentale de veille. Par exemple, le soir, on a la volonté de se lever le lendemain matin à une heure donnée, et on s'éveille à l'heure et à la minute exacte — c'est quelque chose dans l'être subliminal qui a enregistré l'heure et a exécuté l'ordre avec vigilance.
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788
C'est le changement dans la conscience. Quand on commence à sentir l'être intérieur et à vivre en lui (c'est le résultat de l'expérience de la paix et du silence), le sens ordinaire du temps disparaît ou devient purement extérieur.
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789
Pour l'Intuition, le temps est une extension de la conscience où les événements sont rangés; il n'a pas la même rigidité que pour l'intellect.
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790
Vous avez raison. Le présent est une convention, ou seulement un mouvement constant qui sort du passé pour entrer dans l'avenir.
791
Le mot "grandeur" désigne une capacité exceptionnelle d'un genre ou d'un autre, qui rend un homme éminent parmi ses semblables.
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792
Cette sorte de grandeur n'a rien à voir avec le psychique. Elle consiste en une capacité mentale particulière (Raman, Tagore) ou en une grande force vitale qui leur permet de conduire les hommes et de les dominer. Souvent — mais pas toujours — ces facultés sont accompagnées, dans la personnalité, de quelque chose de daïvique ou d'asourique qui soutient leur action et donne aux hommes une impression de grandeur, même en dehors de leur capacité spéciale — le sentiment d'une grande personnalité.
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793
Les gens se sont mis à essayer de prouver que les grands hommes n'étaient pas grands, ce qui est une erreur très grave. Si les hommes n'accordent plus de valeur à la grandeur, le monde deviendra mesquin, étriqué, terne, étroit et tamasique.
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794
C'est évident, la grandeur extérieure n'est pas le but du yoga. Mais ce n'est pas une raison pour ne pas reconnaître le rôle joué par la grandeur dans l'ordre de l'univers, ou la place des grands hommes d'action, des grands poètes, des grands artistes, etc.
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795
C'est le pouvoir en eux [les grands hommes] qui est grand, et ce pouvoir vient du Divin — par leurs actions et leur grandeur, ils aident le monde et contribuent au dessein cosmique. Peu importe qu'ils aient de l'ego ou non — ils ne pratiquent pas le yoga.
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796
Je ne pense pas qu'on puisse dire que Napoléon avait peu d'ego — il était excessivement égocentrique. Il s'était proclamé lui-même dictateur en Brumaire, et il aurait toujours dû agir en dictateur; mais il ressentait le besoin d'un soutien, et il a commis l'erreur de le chercher dans la voie démocratique, voie pour laquelle il n'était pas du tout fait. Il avait les capacités d'un souverain, non d'un politicien; en tant que politicien, il aurait complètement échoué. Ses hésitations étaient dues à ce défaut — si on peut l'appeler ainsi. Il n'aurait pas su comment s'y prendre avec des partis ou une assemblée parlementaire.
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797
Pourquoi le Divin ne s'intéresserait-il pas à la grandeur extérieure? Il s'intéresse à tout dans l'univers. Toute grandeur est la Vibhoûti du Divin, dit la Guîtâ.
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798
Les grands de ce monde ne sont pas les seuls à avoir de l'importance pour le Divin — toute énergie, forte capacité, pouvoir de réalisation a de l'importance.
Quant à Napoléon, César et Shakespeare, pas un seul n'était vertueux, mais c'étaient de grands hommes; vous soutenez que seuls les hommes vertueux sont grands et que ceux qui ont des vices ne le sont pas, ce qui est absurde. Tous couraient après les femmes; deux d'entre eux étaient des ambitieux sans scrupule; Napoléon était très arrogant et très violent.
Shakespeare braconnait. Napoléon mentait couramment, César était sans scrupule.
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799
Êtes-vous capable de juger de ce qui aidera ou n'aidera pas le travail de Dieu? Vous semblez avoir des conceptions très élémentaires sur ces sujets. Comment concevez-vous la divinisation? S'agit-il d'être un homme vertueux, un bon mari, un bon fils, un bon père, un bon citoyen? Dans ce cas, je dois être non-divin — car je n'ai jamais été rien de tout cela. Des hommes comme X ou Y seraient alors de Grands Hommes Divins Transformés.
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800
Mais croyez-vous vraiment que des hommes comme Napoléon, César, Shakespeare, n'étaient pas de grands hommes et n'ont rien fait pour le monde ou pour le dessein cosmique? que les défauts de leur caractère et leurs vices ont empêché Dieu de les utiliser à Ses fins? Quelle idée absurde!
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801
Pourquoi le Divin se préoccuperait-il des vices des grands hommes? Est-il un gendarme? Tant que l'on est dans la nature ordinaire, on a des capacités et des défauts, des vertus et des vices. Quand on va au-delà, il n'y a ni vertus ni vices — car ces choses n'appartiennent pas à la Nature divine.
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802
Le vice et la vertu n'ont rien à voir avec l'obscurité et la lumière, la vérité et le mensonge. L'homme spirituel s'élève au-dessus du vice et de la vertu, il ne s'élève pas au-dessus de la vérité et de la lumière, à moins que par vérité et lumière vous n'entendiez vérité humaine et lumière mentale. Celles-ci doivent être transcendées, comme doivent être transcendés le vice et la vertu.
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803
Les vices sont simplement un débordement d'énergie hors de canaux non régularisés.
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804
Les grands hommes ont davantage d'énergie (mentale, vitale, physique, toutes sortes d'énergies) et l'énergie s'exprime dans ce que les hommes appellent vices, autant que dans ce que les hommes appellent vertus.
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805
Les hommes doués de grandes capacités, ou d'un mental¦ puissant, ou d'un vital puissant, ont très souvent des imperfections de caractère plus flagrantes que les hommes ordinaires, ou du moins les défauts de ceux-ci apparaissent moins, puisqu'ils sont, comme eux, de moindre envergure
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806
Oui, certainement. Beaucoup de grands hommes ont même souvent des vices très grands et nombreux. Les grands hommes ne sont pas habituellement des personnages modèles.
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Que les hommes soient grands, éblouissants ou petits dans leur domaine, l'ambition est l'ambition et elle est nécessaire à la plupart d'entre eux pour que leur action soit énergique. À quoi bon appeler une chose vice quand elle est petite, et la glorifier quand elle est grande?
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808
Quand il y a une grande part de vanité, elle agit habituellement ainsi. Un homme sent l'énergie dans tout ce qu'il fait, et la prend à tort pour un grand talent. C'est une erreur courante. Le grand talent ne s'exerce que dans un ou deux domaines.
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C'est de la vanité, mais ce n'est pas du charlatanisme, à moins qu'il n'y croie pas. S'il n'y croit pas, c'est du charlatanisme, mais pas de la vanité.
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810
La plupart des grands hommes savent parfaitement qu'ils sont grands.
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[Ce que cherchent les animaux:] La satisfaction de leurs émotions, de leurs désirs et des besoins de leur corps, principalement. Les animaux sont, de façon prédominante, la création vitale sur terre; le mental en eux est aussi un mental vital, ils agissent selon l'impulsion des forces et ont une volonté vitale, mais non une volonté mentale.
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812
Même l'animal est, plus que l'homme, en contact avec une certaine harmonie dans les choses. La seule supériorité de l'homme est une conscience plus complexe et des facultés plus diversifiées (mais terriblement perverties et distordues par un mauvais usage du Mental) et la capacité (encore peu utilisée) d'aller vers des choses plus hautes.
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La vie et le mental de l'homme ne sont en accord ni avec la Nature comme les animaux, ni avec l'Esprit — ils sont troubles, incohérents, en conflit avec eux-mêmes, sans harmonie, sans équilibre. Nous pouvons donc les considérer comme malades, sinon comme en eux-mêmes une maladie.
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814
Les plantes sont très psychiques, mais elles ne peuvent exprimer cela que par le silence et la beauté.
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815
[La beauté d'une fleur:] Forme, couleur, parfum et, en plus, quelque chose d'indéfinissable.
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816
La rose n'est pas la seule fleur qui soit belle, il y en a des centaines d'autres; la plupart des fleurs sont belles.
Il y a des degrés et des genres de beauté, c'est tout.
La rosé est parmi les plus belles par la richesse de ses couleurs, la suave intensité de son parfum et la grâce, la magnificence de sa forme.
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817
Il est vrai que le monde des plantes — et même celui des animaux, si on le considère de la bonne manière — peut être bien meilleur que celui des êtres humains. C'est la déformation mentale qui rend les hommes pires.
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818
Oui, la conscience de l'animal est plus simple et plus honnête. Évidemment, il attend quelque chose, mais même s'il ne reçoit rien, l'affection demeure. Beaucoup d'animaux, même s'ils sont maltraités, "ne perdent pas leur amour, ce qui est le signe d'un remarquable développement psychique dans le vital.
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L'être émotif des animaux est souvent beaucoup plus psychique que celui de l'homme qui peut être très insensible. On a vu récemment des photographies d'une tigresse apprivoisée qui avait vécu dans une famille et a ensuite été donnée à un zoo. L'expression de tristesse sur le visage de la tigresse dans sa cage, à la fois douce et tragiquement poignante, est d'une intensité à briser le cœur.
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La plupart des animaux n'attaquent pas habituellement, à moins qu'ils ne soient menacés, ou effrayés, ou irrités d'une manière ou d'une autre — et ils peuvent sentir l'atmosphère des gens.
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Les chats ont une perception vitale très sûre.
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Il y a des gens qui peuvent remuer les oreilles sans faire aucun yoga ni recourir à la Koundalinî. Je suppose que c'est simplement un mouvement que l'homme a perdu par désuétude, n'ayant pas, comme les animaux, à dresser les oreilles à tout moment pour écouter les bruits qui peuvent signaler un danger. Il pourrait sans doute raviver cette faculté en cas de besoin.
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[Responsabilité de la souffrance] Pourquoi incomberait-elle à l'homme? Et les animaux? ils souffrent aussi. Vous pouvez dire que la souffrance est une déformation de la conscience inférieure, mais vous ne pouvez pas en rendre l'homme ou la nature humaine seuls responsables.
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824
Oui — observer les animaux avec la perception juste de leur conscience aide à sortir des limitations mentales humaines et à voir la Conscience cosmique sur terre s'individualisant dans toutes les formes-plante, animal, homme, et croissant vers ce qui est au-delà de l'homme.
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Je ne sache pas que les personnalités hautement évoluées n'aient pas le sens de l'humour, et je ne vois pas comment on peut dire qu'une personne est intégrée quand ce sens lui manque. "Laisser-aller" s'applique seulement à une légèreté frivole et sans substance. Aucune loi n'oblige la sagesse à être quelque chose de rigidement solennel, sans un sourire.
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Le sens de l'humour? C'est le sel de l'existence. Sans lui, le monde aurait complètement perdu l'équilibre — il est déjà assez déséquilibré — et il serait allé au diable depuis longtemps.
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Les gens sont extraordinairement stupides – mais, je crois, ils ne peuvent pas aider eux-mêmes. Que plus je vois l'humanité, plus il oblige à se persuader de cela. Les gouffres de la débilité, sur qui l'esprit humaine est capable...
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Mon opinion est – Allah est grand et l'énigme de l'univers est grande et les objets sont non ce de quoi ils ont l'air, etc.
1 Absurde parce que la grandeur d'un yogi ne se mesure pas à la durée de sa vie ni à son état de santé, mais à l'élévation ou à la profondeur de sa réalisation et de son expérience spirituelle. (Note de Sri Aurobindo)
2 Beurre clarifié (de vache ou de bufflonne).