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Mère

Commentaires sur Le Dhammapada

Tape records

 

La convoitise1

Chez l’homme sans vigilance, la convoitise croît comme la plante grimpante du Maluva. Il bondit d’existence en existence, comme le singe en quête de fruits dans la forêt.

Quiconque est dominé par la farouche convoitise voit ses peines croître et grandir comme le gazon du Birana après la pluie.

Mais quiconque domine cette convoitise si difficile à vaincre voit ses peines tomber comme la goutte d’eau glisse du lotus.

À tous ceux assemblés ici je donne ce conseil salutaire: extirpez la racine de la convoitise, comme on arrache le gazon du Birana. Ne laissez pas Mâra vous briser sans cesse, comme le fleuve casse le roseau.

Comme un arbre abattu jette encore des bourgeons si ses racines demeurent intactes et fortes, ainsi la souffrance jaillit encore et toujours, tant que l’on n’a point aboli en soi la convoitise.

Incapable de résister puissamment aux trente-six courants des passions, l’homme mal guidé, avide de plaisir, est emporté par le flot.

De toutes parts coulent ces courants, et la plante grimpante [de la sensation] s’agrippe et bourgeonne. En la voyant monter, soyez assez avisés pour la couper dans sa racine.

En laissant leur esprit s’attarder avec délice au milieu des voluptés, les hommes deviennent la proie de la naissance et de la mort.

Traqués par la convoitise, les hommes courent en tous sens comme des lièvres poursuivis. Saisis et ligotés, ils connaîtront longtemps encore la souffrance.

Traqués par la convoitise, les hommes courent en tous sens comme des lièvres poursuivis. Rejette donc le désir, ô Bhikkhu qui aspires à t’affranchir du passionnel.

Celui qui, libéré de la jungle du désir s’y replonge, regarde-le comme un être affranchi retournant à l’esclavage.

Aux yeux du sage, les lourdes chaînes ne sont pas faites de fer ni de bois ni de chanvre; ce sont plutôt l’ardente convoitise des joyaux et des parures, ainsi que l’attachement aux enfants et aux épouses.

Certes, c’est un puissant lien, déclare le sage, et il paralyse les hommes, et il est pénible de s’en débarrasser. Cependant, certains le coupent, et choisissent la vie sans foyer; ils abandonnent le plaisir et le désir sans regarder derrière eux.

Il en est qui s’emprisonnent dans leur propre filet d’acharnement au plaisir, comme l’araignée dans sa toile. Le sage passe au travers, sans se retourner, et laisse tout souci derrière lui.

Affranchis-toi du passé, affranchis-toi de l’avenir, affranchis-toi du présent pour les dépasser. Ayant ainsi libéré ton mental, tu ne reviendras plus dans la naissance et dans la décrépitude.

L’homme agité par le doute, subjugué par ses passions, attentif au seul plaisir, voit la convoitise grandir en lui, il se forge une lourde chaîne.

L’homme qui se délecte dans l’apaisement du mental, qui ne craint pas le déplaisir, en vérité, il brisera, il anéantira la chaîne de Mâra.

Il s’approche de la grande Consommation sans crainte, délivré de la convoitise, sans reproche, ayant détruit les épines de l’existence et ce sera sa dernière incarnation.

Délivré du désir, détaché de tout, habile à comprendre l’Enseignement, versé dans le sens réel des mots, tel il se montre en sa dernière incarnation; et on l’appelle le Grand Homme, Grand Sage.

«Je suis celui qui a tout compris et tout appris, que rien ne pollue ni n’embarrasse, libéré par la destruction des convoitises, ayant seul tout pénétré. Qui donc pourrais-je appeler mon maître?»

Au-dessus de tous dons, règne le don de la Doctrine. Au-dessus de toutes saveurs, règne la saveur de la Doctrine. Au-dessus de tous les délices, règnent les délices de la Doctrine. Au-dessus de toute souffrance, règne la fin de la convoitise.

Les richesses anéantissent l’insensé s’il ne cherche point ce qui est au-delà. Par sa passion pour elles, l’insensé se tue comme il tuerait ses ennemis.

Les mauvaises herbes sont la perte des cultures; l’avidité est la perte de notre génération. En conséquence, le don de la doctrine du détachement produit beaucoup de fruits.

Les mauvaises herbes sont la perte des cultures; la haine est la perte de notre génération. En conséquence, le don qui vous libère de la haine produit beaucoup de fruits.

Les mauvaises herbes sont la perte des cultures; l’illusion est la perte de notre génération. En conséquence, le don qui vous libère de l’illusion produit beaucoup de fruits.

Les mauvaises herbes sont la perte des cultures; le désir égoïste est la perte de notre génération. En conséquence, le don qui vous libère de l’égoïsme produit beaucoup de fruits.

Nous garderons le dernier pour méditer.

8 août 1958

 

1 La traduction de ces versets par Bhâratîdî ayant été égarée, nous avons emprunté celle de R. et M. de Maratray publiée par la Librairie Orientaliste Paul Geuthner (anciennement 13, rue Jacob, Paris) afin que le texte du Dhammapada soit complet.

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