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Mère

Commentaires sur Le Dhammapada

Tape records

 

Ceux qui considèrent l’erreur comme vérité et la vérité comme erreur n’atteindront jamais le but suprême, car ils errent parmi les vains désirs ou vues fausses.

On pourrait ajouter un commentaire, parce que si l’on se contentait de prendre l’erreur pour la vérité et la vérité pour l’erreur, il devrait être très facile, logiquement, dès que, pour une raison quelconque ou avec une aide quelconque, on s’aperçoit de ce qui est vraiment la vérité et de ce qui est vraiment l’erreur, de faire son choix: on adopte la vérité et on rejette l’erreur. Mais le malheur est qu’on aime son erreur et qu’il y a quelque part dans l’être une sorte de mauvaise volonté à reconnaître ce qui est vrai.

Mon expérience est comme ceci: c’est que, dès que l’on veut sincèrement connaître la vérité, on la connaît. Il se trouve toujours quelque chose pour vous faire toucher du doigt l’erreur, pour vous faire reconnaître la vérité.

Et si l’on s’observe attentivement, on s’aperçoit que c’était parce que l’on préférait l’erreur qu’on ne trouvait pas la vérité.

Même pour de petits détails, le moindre détail (sans parler des grandes choses de la vie, des grandes décisions à prendre), même pour les toutes petites choses, dès que l’aspiration à la vérité et la volonté d’être vrai sont tout à fait sincères, l’indication vient toujours. Et justement, avec la méthode de discipline bouddhique, si l’on poursuit intérieurement les causes de sa manière d’être, on s’aperçoit toujours qu’une persistance dans l’erreur vient d’un désir. C’est parce qu’on a une préférence, un désir pour sentir d’une certaine façon, pour agir d’une certaine façon, pour penser d’une certaine façon, que l’on commet l’erreur. Ce n’est pas parce que l’on ignore tout simplement ce qui est vrai. On l’ignore surtout parce que c’est d’une façon vague, générale, imprécise, que l’on dit: «Oh! je veux la vérité!» Mais en fait, si l’on prend un détail — tous les détails — et que l’on mette juste le doigt dessus, on s’aperçoit qu’on fait l’autruche, pour ne pas voir. On établit une imprécision, quelque chose de vague, un voile pour ne pas regarder derrière.

Dès qu’il y a sincérité, on découvre que l’aide, la direction, la Grâce, sont toujours là pour répondre, et qu’on ne se trompe pas longtemps.

C’est la sincérité dans l’aspiration au progrès, dans la volonté de vérité, dans le besoin d’être vraiment pur — pur comme on l’entend dans la vie spirituelle —, c’est cette sincérité-là qui est la clef de tous les progrès. Avec elle, on sait — et on peut.

Il y a toujours quelque part dans l’être quelque chose qui préfère se tromper, autrement la lumière est là, toujours prête à guider, mais on ferme les yeux pour ne pas la voir.

22 novembre 1957